dimanche 7 août 2011

Grand banditisme : les nouveaux gangsters n'ont peur de rien !



« On a affaire à une équipe de fous dangereux » affirme le directeur inter-régional de la police judiciaire de Marseille, Roland Gauze. Il ne croit pas si bien dire. Un fourgon de transport de fonds vient d’être pillé ce lundi 31 mai 2010 à Marseille par un commando lourdement armé qui s'est emparé de 2,1 millions d'euros. Celui-ci n'a pas hésité à arroser de balles les convoyeurs, les automobilistes alentour et une patrouille de CRS. Miracle, il n’y a pas eu un seul blessé. Et tout ça en plein jour et à quelques mètres seulement du commissariat de police.

Peu de jours avant, et encore à Marseille, des braqueurs ont dérobé près de 200 kilos de bijoux et d'or d'une valeur estimée à 6,4 millions d'euros. En vrais professionnels "remarquablement renseignés", ils ont pris soin d'effacer toutes leurs traces.

Enfin, à Lyon, des voleurs déguisés en policiers et armés de fusils d'assaut ont attaqué le mardi 1er juin une bijouterie. Un scénario qui marque une nouvelle étape dans les braquages en série de ces derniers mois dans la région lyonnaise, premier pôle de fabrication de bijoux en France. Une dizaine d'attaques de bijouteries ont eu lieu ces derniers mois dans la région , conduisant les commerçants à se déclarer en "situation de guerre" contre les malfrats, dont certains ont pris des employés en otages ou à faire usage de leurs armes.

Ce ne sont que des illustrations parmi tant d’autres. En effet, cela se passe partout en France.

Plus récemment encore, durant cet été 2011, des malfaiteurs ont forcé un dabiste de la Brink's à porter une prétendue ceinture d'explosifs (qui s'est révélée être factice) pour le contraindre à retirer de l'argent dans deux distributeurs automatiques de billets (DAB) : l'un au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) et l'autre à Asnières (Hauts-de-Seine). Le montant du butin d'Asnières n’est pas encore connu mais celui de Blanc-Mesnil s’élève à 80000 € et l’employé a été retrouvé enfermé dans le local technique de l’agence LCL.

Il s'agissait de la troisième attaque de ce type en trois semaines, un nouveau mode opératoire, qui, après les voitures-bélier et les plastiquages de distributeurs, inquiète les policiers.

Mais qui sont ces nouveaux gangsters qui font tant peur à la police ?

Il y a une rupture qui frappe immédiatement : ces nouveaux malfaiteurs sont beaucoup plus violents et n'hésitent pas à tirer sur tout ce qui bouge pour arriver à leurs fins. Comme ça s'est passé à Villiers-sur-Marne, où la policière municipale, Aurélie Fouquet, a été tuée. Les grandes équipes de braqueurs, corses ou de la Côte d'Azur, font preuve de plus de maîtrise et de principe.

La pauvreté sociale et économique, les manques de repères, l’inconscience de la valeur de la vie ou encore le manque de perspective crée ce genre de dérive inacceptable dans un Etat de droit.

Plus grave, l’Etat ne se fait plus respecter. La police recule devant des tueurs qui dégainent une kalachnikov pour mitrailler leur cible, en plein jour, à une heure de grande affluence, sur une artère très fréquentée. C’est un terrible coup de vieux pour « Le Parrain » de Francis Ford Coppola ou encore « Les Affranchis » de Martin Scorcese. Le film culte aujourd’hui serait plutôt « Scarface » de Brian de Palma (avec Al Pacino et Michelle Pfeiffer) ou encore « Heat ».

Je recommande d’ailleurs à tout le monde de voir le film « The French Connection », réalisé par William Friedkin en 1971 et qui a été récompensé par cinq Oscars.

Cette fascination pour le crime organisé ou le grand banditisme est intrigante. Prenons l’exemple du convoyeur de fonds le plus connu de France, Toni Musulin. Il a été condamné à trois ans de prison ferme par le tribunal correctionnel de Lyon pour avoir dérobé plus de 11,6 millions d'euros à bord de son fourgon en novembre 2009. Il est considéré par beaucoup de jeunes en cité comme un héros et comme un « Robin des bois ».

De la fascination à la reproduction d’un acte, le pas est vite franchi. C’est ce que j’appelle tomber dans la facilité.

Voici les conséquences de cette économie souterraine au sens large (Source Le Figaro - Christophe Cornevin) :
 
À l'occasion de ses vingt ans d'existence, Tracfin a vu le nombre de ses saisines augmenter de 12% l'année dernière pour atteindre 20.252 signalements. La cellule de renseignement financier dresse dans son rapport annuel un tableau édifiant de la face obscure de l'économie française. Elle a transmis 404 dossiers à la justice en 2010, portant sur un montant de 524 millions d'euros.

Détournement massif de prestations d'organismes sociaux

Les fraudes aux différentes branches de la Sécurité sociale ont pris des formes industrielles dans notre pays. Servant à alimenter en partie l'économie souterraine, ces détournements entrent, selon Tracfin, «dans le nouveau champ d'intervention du crime organisé». Le rapport décrit notamment une tentaculaire magouille fondée sur la technique de «comptes de collectes» au préjudice de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV): des prestations sociales ont ainsi transité sur 17.000 comptes pour être reversées au profit d'une centaine de «collecteurs». Une partie des fonds a filé vers des centrales d'achats basées à l'étranger. En deux ans, le préjudice a été estimé à 30 millions d'euros. Au niveau national, le ministère du Travail estimait, en 2009, le montant de la fraude sociale entre 5 milliards et 8 milliards d'euros.

Mise en place de réseaux d'«entreprises de blanchiment»

L'année dernière, Tracfin dit avoir «détecté l'existence de plusieurs réseaux de financement de filières d'immigration clandestine et de travail illégal» mis en place par des bandes issues de la criminalité organisée. À la manière de la mafia italienne, le grand banditisme a investi certaines branches lucratives. Les experts ont ainsi mis en lumière un «système occulte de collecte de fonds entre de nombreuses entreprises du BTP et un grand nombre de sociétés de téléphonie». En contrepartie de chèques émis au bénéfice de ces dernières, des sociétés du bâtiment récupèrent des espèces pour payer une main-d'œuvre clandestine.

Retour des grandes escroqueries liées à la spéculation financière

Évoquant un «contexte de déréglementation et d'innovation financière», le rapport a relevé l'année dernière la montée en puissance «d'escroqueries aux placements financiers reposant notamment sur l'exercice illégal de la profession de banquier». Des arnaques identiques à celle mise sur pied par Bernard Madoff, condamné à cent cinquante ans de prison en 2009, ont été observées. Baptisée «pyramide de Ponzi», cette chaîne frauduleuse consiste à rémunérer les placements de premiers épargnants par les seuls fonds apportés par les nouveaux investisseurs. Ce schéma, fondé sur un effet «boule de neige», vole en éclats quand la crise entraîne des défauts de paiement en série. Tel un jeu de dominos, les clients se retrouvent ruinés les uns après les autres.

Hausse des abus de faiblesse

«Vol, extorsion de fonds, procuration frauduleuse, signature forcée, héritage anticipé, prélèvements indus de biens ou d'argent…»: reprenant le constat établi par le Médiateur de la République le 3 février 2011, la cellule gouvernementale insiste sur la maltraitance financière. «Phénomène peu connu en France et en forte hausse», il concerne en majorité des victimes de plus de 70 ans, un tiers étant nonagénaires. Le plus grand nombre d'affaires a été relevé dans les zones rurales de l'Ouest et du Centre de la France. Dans une affaire sur trois, les suspects figurent parmi les gens de maison, jardiniers ou auxiliaires de vie. Des employés de banque et des commerciaux indélicats ont aussi été épinglés. Un dossier sur deux porte sur des montants inférieurs à 100.000 euros.

Financement du terrorisme

Prenant la forme d'opérations «ponctuelles, fractionnées et de faible montant» (inférieures à 1000 euros), ces flux financiers irriguant des mouvances terroristes échappent souvent à la vigilance des pouvoirs publics. Tracfin, qui a cependant transmis six «notes d'information» à la justice en 2010, estime que le «milieu associatif», les «petites entreprises» ainsi que les particuliers représentent les «principaux acteurs» susceptibles d'alimenter les activités des poseurs de bombes. Selon ces experts, le «caractère atypique des flux analysés met en exergue un risque terroriste».

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